lundi 3 août 2015

XIPE TOTEC - Miquian

XIPE TOTEC


Miquian






Pre-hispanic death metal
Date de sortie: 15 février 2015
Label: Nerocronomo Music / Invicible Records



Tracklist:
1. Miquian
2. In Yaotl Nohtic
3. In Miquicahuacayotl Oquintliacualtihqueg In Tlalli
4. Xinechtemotlalli Campa Tletl
5. Tocempohpolihuian
6. Titlic Tonaltzin
7. Nomallot
8. Tlacamictiliztli Ohtlipa
9. Tlatomontecuhtli
10 Tlaxicoliztli
11. Eztli (demo 98)
12. Yaotl (demo 98)
13. Tlamacazqui (demo 98)








Se faire passer pour un (mauvais) chroniqueur a quand même bien des avantages. En premier lieu, il y a bien entendu la découverte continue d’excellents groupes mais même au-delà de ça il y a un aspect que j’apprécie tout particulièrement, c’est le fait de rebondir sur le message porté par ces groupes, de se documenter sur leur univers et au final, d’apprendre énormément de choses sur des sujets que l’on aurait sinon jamais abordés. Les civilisations anciennes et leurs us et coutumes sont certainement l’un des thèmes les plus passionnants lorsqu’il est associé au metal, d’autant plus qu’elles offrent souvent un background qui colle parfaitement au style. C’est donc au Mexique que nous partons aujourd’hui, à la rencontre du duo Xipe Totec et de son death metal inspiré par la civilisation Aztèque. 
Les titres étant tous en nahuatl, il m’est assez difficile d’en saisir toute la teneur, nous retiendrons surtout que Xipe Totec est le dieu du renouveau de la nature, de l'agriculture et des pluies nocturnes fertiles. Il s'écorche lui-même pour nourrir l'humanité, symbolisant ainsi le grain de maïs perdant son enveloppe avant de germer. Il est également le patron des orfèvres. Son culte se déroule pendant le deuxième mois du calendrier aztèque, Tlacaxipehualiztli (littéralement "écorchement des hommes"). Il implique des sacrifices humains, l'un de masse avec arrachage du cœur et l'autre réservé à l'élite des guerriers : il oppose un prisonnier volontaire de haut rang à des chevaliers aigles et des chevaliers jaguars. Le sacrifice consiste à arracher le cœur du sacrifié (qui a vécu comme un prince pendant l'année qui précède le sacrifice), drogué aux champignons hallucinogènes pour ne pas se rendre compte de ce qui lui arrive, puis à retirer sa peau. Le prêtre la portera sur lui pendant un mois. Une autre technique consistait à percer les victimes avec des flèches afin que leur sang inonde le sol comme une pluie fertilisante. Puis le prêtre sacrificateur revêtait sa peau qui, comme la première méthode, était portée comme un vêtement pendant un mois aztèque.
Miquian est ainsi dédié au Tonalpohualli, un calendrier découpé en périodes de 13 jours, chacune dédiée à une divinité particulière. La pochette de l’album, bien dans l’esprit death metal, représente les trois composantes animiques de l'être humain à savoir Teyolia, Tonalli et Ihíyotl. Les Nahuas associaient le teyolia au coeur, et les considéraient comme le siège de la conscience, de la mémoire, de la volonté, des émotions, des passions et du souffle vital, leur attribuant les valeurs d'intériorité, de sensibilité et de pensée, tandis qu'ils situaient le tonalli dans la tête et l'ihíyotl dans le foie; de ce fait, les sacrifices humains par cardiectomie, qui se terminaient par des offrandes consistant notamment à offrir à une divinité le cœur ainsi extrait, avaient pour but de libérer le teyolia et de transmettre ainsi de la vie, du mouvement et de l'énergie à la divinité bénéficiaire du sacrifice, ainsi qu'aux sacrifiants (source: Wikipedia, plus détaillé sur les versions anglaises). 

Bref, c’était pour planter le décors et je crois qu’on est d’accord, conceptuellement parlant, pour du death metal brutal et technique, on y est. Intéressons nous maintenant à la forme, je vois bien que j’en ai perdu quelques uns dans le fond de la salle… Miquian est le 4me album des Mexicains et le duo a cette fois repoussé les limites de son metal dévastateur sous une avalanche de riffs plus bourrins les uns que les autres assemblés de façon parfois inattendue mais franchement bien pensée. Les changements de rythme sont à ce titre plutôt nombreux et décuplent la force de frappe des compositions dans une barbarie et une sauvagerie musicale assez impressionnante. Les guitares taillent sévèrement dans le gras et écorchent probablement aussi bien que les sacrifiants dont il état question plus haut. Quant à la batterie… Elle est juste sans merci. Les nombreux solos qui parsèment l’album témoignent en plus d’un niveau assez élevé, tapent dans le mille et… on en prend plein la gueule, vraiment. Mais là où le boulot de Xipe Totec devient franchement intéressant, c’est dans son utilisation d’instruments de l’époque précolombienne (flûtes, huehuetl et autres percussions). C’est déjà assez rare pour être souligné mais il faut reconnaître que l’équilibre est juste parfait, l’imagination devrait faire le reste et ne pas vous demander trop d’efforts. Si ces instruments antiques sont souvent utilisés seuls lors d’introductions ou de breaks , ils n’interfèrent en aucun cas avec la base death metal du groupe lorsque les deux sections se mélangent. Il y a au contraire une véritable coordination rendue possible notamment par une production des plus réussies. Le tout sonne de façon très naturelle et percutante. Par ailleurs, l’utilisation judicieuse d’une grosse réverb sur les percussions tribales et les flûtes les font résonner dans le lointain ajoutant un écho mystique et caverneux. Même quand Xipe Totec ne mise pas sur la brutalité et le martelage excessif, sa musique reste sauvage.
Le duo parvient néanmoins à placer quelques passages mélodiques du plus bel effet, je pense par exemple à l’instrumental en contrepoint "Tocempohpolihuian" qui vient apaiser cette débauche d’énergie primitive ou encore le solo placé à la fin de "Tliltic Tonaltzin" soit sur un morceau pourtant particulèrement violent. On retrouve par ailleurs ici ou là quelques réminiscences thrash voire même quelques emprunts à Death sur de brefs passages au milieu de cette déflagration sonore ce qui fait de Miquian un album résolument riche, puissant et passionnant peu importe l’angle sous lequel on le prend.  

Il y aurait encore probablement des tas de choses à dire mais finalement la meilleure façon d’appréhender cet album est de fermer les yeux et de se jeter à corps perdu dedans. Nos 2 comparses maîtrisent aussi bien les mécanismes du death metal que ceux de la musique précolombienne (enfin, j’imagine…) et sauront vous faire voyager sans problème tout en vous martelant violemment les tympans (l’arrachage de coeur et l’écorchage est passé de mode).


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